Colloque « Libre de s’instruire ? »

Les Plumes n° 39, décembre 2017

Les 6 et 7 octobre 2017 s’est tenu au Luxembourg un colloque international intitulé « Free to Learn ? Libre de s’instruire ? Frei sich bilden ? » Il a été organisé par Katy, une maman non scolarisante membre de l’Association luxembourgeoise pour la liberté d’instruction (Alli asbl), avec le concours de familles locales. Il s’est déroulé dans trois langues (anglais, français, allemand) et les propos des intervenants (Alan Thomas, Harriet Pattison¹, Peter Hartkamp, Franziska Klinkigt, Bertrand Stern, Jean-Pierre Lepri, Bernard Collot, Mélissa Plavis et moi-même, ainsi que Pierre Reding, ancien inspecteur et actuellement Premier Conseiller au Gouvernement du Luxembourg) ont pu être traduits simultanément grâce à la présence d’interprètes professionnels.

Réflexions et anecdotes
Les invités ont évoqué leur pratique en école démocratique, leur réflexion sur la non-scolarisation, sur la liberté, ils ont répondu aux questions du public, une centaine de personnes, et ont partagé le fruit de leurs recherches. Bernard Collot a raconté, avec beaucoup de naturel et de gaieté, ses souvenirs d’instituteur, le long trajet que certains enfants devaient effectuer pour venir à l’école, long trajet plein de multiples distractions. Il a évoqué avec drôlerie l’aspect garderie de l’école et les parents qui lui confiaient leurs petits pendant qu’ils allaient faire les courses, les enveloppes remplies d’un cahier vide au moment de l’orientation des enfants (enveloppes au contenu jamais vérifié par qui que ce soit), ou encore sa gestion toute personnelle de l’assiduité de ses élèves…

Quelques extraits du colloque
Je vous livre, en vrac, quelques phrases retenues des uns et des autres :
• « L’éducation existe depuis environ 200 ans. Le monde ne va pas mieux depuis. Les gens qui décident des guerres ont tous été éduqués. […] Pour décider de la solution finale, pendant la seconde guerre mondiale, sur les treize personnes présentes, huit avaient un doctorat. […] Chaque fois que je veux éduquer quelqu’un, je postule implicitement qu’il n’est pas capable d’apprendre seul » Jean-Pierre Lepri.
• « Plein de bâtiments s’appellent écoles mais ne sont pas utilisés. Alors, stratégiquement, il y a quelque chose à faire » Bernard Collot.
• Avec virulence, Bertrand Stern nous a rappelé que c’est « uniquement pour notre croyance que nous continuons à jouer ce jeu malsain, à forcer nos filles et nos fils à aller à l’école » et a affirmé que la non-scolarisation était une remise en question de la normalité et de la normalisation.
• Pour Mélissa Plavis, « l’école produit des individus consommateurs de savoir ».
• « L’ignorance est la base de la découverte » Bertrand Stern.
• « Un jeune qui envoie un SMS à son copain pendant le cours de maths n’apprend pas ce que le prof voudrait, mais apprend quelque chose » Jean-Pierre Lepri.

Présence d’un représentant de l’État luxembourgeois
Le conseiller luxembourgeois a longuement développé les modifications à venir d’ici la fin de l’année 2017 au Luxembourg. Ses réponses aux questions de la salle montraient clairement, malgré toute sa bonne volonté affichée, le fossé le séparant du point de vue des familles, notamment à propos du unschooling, que personne ne semble définir de la même façon. Il a évoqué la création d’une instance spécialement dédiée à la non-scolarisation mais la formation de ses membres a paru assez floue. Par conséquent, les Luxembourgeois auront-ils affaire, eux aussi, à des inspecteurs juges et partie, peu au fait de la non-scolarisation, mais néanmoins mandatés pour la juger ?

Bernadette Nozarian

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1 – Chercheure et auteure de Rethinking Learning to Read (Repenser l’apprentissage de la lecture).

Le programme de ce colloque ainsi que l’intégralité des échanges sont peu à peu disponibles en ligne.
L’idée est lancée de lui donner une suite.